Blog pour les amateurs de polars et thrillers...ainsi que pour ceux qui veulent découvrir la criminologie...
Le profilage, traduction approximative du mot anglo-saxon
"profiling", est un concept américain né dans les années 1950 pour faciliter l'identification des "serial killers" ou tueurs en série. Récemment importé des Etats-Unis, il a été rapidement
médiatisé par la diffusion de films ou de séries télévisées. Malgré cela, en France où nous avons peu de tueurs en série (statistiquement il en est identifié un tous les deux ans) donc moins
besoin de profileurs, il s'agit plutôt de conseils psychologiques que d'un vrai profilage exécuté par un fonctionnaire de police au cours d'une enquête criminelle.
L'origine américaine et l'informatisation du profilage.
Dès 1958 l'agent spécial Ressler tenta de regrouper les
différentes informations recueillies lors des crimes présentant une certaine similitude. Cette recherche fût très vite informatisée. En 1969 Pat Mullany et Howard Teten créèrent une unité
spécialisée (Behavioral Science Unit BSU) afin de regrouper les informations concernant les caractéristiques propres à chaque homicide recueillies par les agents spéciaux et pouvoir ensuite
construire le profil psychologique de son auteur. Cette unité a aujourd'hui pour mission de développer des programmes d'entraînement, de recherche et de consultation pour toute organisation
luttant contre le crime. Elle a créé une base de données informatisée afin de pouvoir établir un rapprochement entre les différents crimes présentant des
similitudes.
Dans les autres pays.
Au Canada un système d'analyse des liens entre les
crimes de violence connu sous le nom de VICLAS a été mis en place en 1991. Ce système a été adopté par la Belgique, l'Autriche et la Hollande. Le Royaume Uni a utilisé jusqu'en 1994 le système
HOLMES actuellement remplacé par HOLMES 2 qui est un système très élaboré. Quant aux pays de l'Est, ils confient ce type de rapprochements à des services de l'Etat.
En France,
On connaît quelques tentatives d'identification
informatisée où intervient la dimension psychologique. Depuis 1994 la Gendarmerie Nationale possède un programme d'analyse criminelle (ANACRIM) comportant deux types d'analyse informatisée, l'un
basé sur le temps, l'autre sur les liens. Il s'agit plus d'une technique informatisée d'analyse criminelle que d'un véritable profilage. Le RAID a créé un logiciel qui en "profilant le preneur
d'otages et son environnement" permet de faciliter l'identification de son type de personnalité, d'évaluer le niveau de danger de la situation et d aider à la prise de négociation lors de la
décision.
La Brigade Criminelle de la Préfecture de Police de Paris met au point un logiciel CHARDON (comportements Homicides; Analyse et Recherche sur les Données
Opérationnelles Nationales) permettant de regrouper les informations concernant des infractions susceptibles d'avoir été commises par un même individu en raison de similitudes dans leur mode
opératoire. Les questionnaires (218 questions) remplis par les enquêteurs à propos des modes opératoires y sont croisés. Le projet est étendu à la résolution de crimes sans mobile. Il est
vraisemblable que sa fonction couvrira par la suite l'identification de "violeurs en série" et surtout de "pédophiles multirécidivistes et des réseaux afférents". Il s'agit d'un travail de
profilage au sens psychologique du terme, auquel d'autres pays européens devraient être associés. La formation d'enquêteurs spécialisés ira sans doute de pair.
Le
profilage psycho-criminologique est en France la construction virtuelle d'un profil psychologique, typologique, social et physique d'un auteur (en général un criminel) non
identifié.
Ce travail est effectué par un spécialiste du comportement humain à partir de la connaissance du cas par l'analyse de la scène du crime (quand celui ci est relativement récent), du modus operandi, de la personnalité de la victime (quand elle est -identifiée), de la totalité de la procédure d'enquête (photos, PV, expertises, auditions) et de tous les éléments matériels rassemblés par les enquêteurs. L'auteur du profil doit corréler tous ces éléments dans son étude et ses conclusions . L'identification de la victime est fondamentale, car elle permet d'élaborer le "lien victimologique " qui l'a unie, ne serait ce qu un instant, à son agresseur.
Des réunions et séances d'informations fréquentes entre tous les intervenants permettent d'élaborer en commun des hypothèses construites à partir d'éléments non matériels tels que par exemple la psychologie supposée de la victime, l'interprétation de tel élément susceptible d'être la signature de l'auteur etc..., éléments qui doivent impérativement être liés aux indices concrets recueillis par les enquêteurs et/ou apportés par les expertises.
Tous les points de l'enquête : lieu de découverte du corps, jour, heure, spécificité de ce jour (dimanche de fête par exemple), position, aspect de la victime, son autopsie, modus operandi, de la scène du crime, auditions des différents témoins, étude de l'environnement et du voisinage doivent être examinés, compilés et mis en corrélation. Ensuite des conclusions peuvent être tirées et les hypothèses éventuellement modifiées.
Parfois l'enquête est réorientée, parfois des concordances sont trouvées entre différentes affaires. Enfin la meilleure stratégie lors des auditions de différents suspects peut être établie avec les enquêteurs après l'établissement du profil de la personnalité de chaque suspect.
Ceci implique la collaboration de tous les acteurs de l'enquête mais aussi la
contribution de toutes les disciplines criminelles et criminalistiques : psychologie et psychiatrie criminelles, sociologie, ensemble des approches techniques (empreintes digitales, balistique,
microanalyse, signal image parole, biologie et toutes ses applications, toxicologie, entomologie, thanatologie, anthropologie, odontologie, etc... et fichier ADN depuis
peu).
Le profilage est souvent perçu et défini comme la faculté
qu'aurait le profileur de s'identifier à l'auteur ou à la victime, fonctionnant par flashes, intuition ou pressentiment... Il n'en est rien. Il s'agit d'une technique basée sur un réel
protocole.
Destiné primitivement à l'identification des tueurs
multirécidivistes, le profilage connaît d'autres applications surtout en France. Les viols en série, la pédophilie, les violences sexuelles accompagnées d'acte de torture et de barbarie, les
incendies volontaires sont des infractions auxquelles le profilage se prête bien.
Le métier de
profiler n'existe pas en tant que tel en France. Cependant, depuis quelques années les juges d'instruction font appel à des profileurs occasionnels. Cette démarche étant à ses balbutiements,
on voit fleurir des vocations de profileurs chez des individus n'ayant aucune connaissance de la criminologie et de la psychologie.
Il serait donc souhaitable qu'une réelle formation se mette en place et soit réservée à des experts judiciaires criminologues, psychiatres ou psychologues, spécialistes du comportement humain, ayant une grande expérience de l'expertise et de l'enquête criminelle leur permettant de donner leur propre lecture d'un dossier d'instruction.
Seuls les Juges d'instruction peuvent délivrer une mission spécifique de "profilage", commission d'expert habituellement intitulée "analyse psycho-criminologique de la procédure x et collaboration et assistance avec les enquêteurs ".
L'expert dispose de la totalité de la procédure dont la longue et difficile lecture, attentive et analytique, constitue le premier pas dans la connaissance du dossier. Ce dernier est parfois constitué de plusieurs milliers de pages (surtout si un rapprochement est envisagé entre deux affaires) et pèse plus de 10 kg... Il doit en permanence être alimenté par les nouveaux éléments recueillis ; ce travail constitue une collaboration étroite, précise et appliquée entre le magistrat, les enquêteurs, les différents experts et "l'expert-profileur" nommé.
La communication interne à ce groupe doit être riche, le doute et le droit à l'erreur doivent aussi être possibles et les réunions et échanges être fréquents.
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La psychocriminologie (ou psychologie criminelle) est une branche du secteur de la criminologie.
La psychologie apporte à l’étude des crimes une analyse des processus psychiques de l’individu délinquant. Il en va de même pour
l’association de plusieurs individus. Notons aussi l’étude de la signification du comportement délinquant pour son auteur, mais également pour la victime, la société constituant le domaine
d'étude/de recherche des professionnels. Le processus de développement psychologique d’une personne avec toutes les manifestations pathologiques susceptibles d’apparaître et d’engendrer des
comportements délinquants est étudié. Enfin, les actions de prévention, d’aide ou de traitement font largement appel aux contributions de la psychologie.
Le métier d'expert judiciaire demande une grande écoute, une totale objectivité, du recul, une formation renforcée et aussi une longue expérience. Ce n'est qu'ensuite et avec modestie que l'on peut aborder ce que l'on appelle "le profilage". Le profilage est un ménage à 3: le juge, les enquêteurs et l'expert.
Un
psychocriminologue a pour mission de relire les dossiers criminels lors des enquêtes afin de trouver d’éventuels détails omis par les enquêteurs. Par exemple, en étudiant de plus près le
comportement du criminel à travers ses actes, le psychocriminologue est en mesure de déterminer de quels troubles il souffre, ainsi que d’évaluer sa dangerosité.
Dans le domaine de la
psychocriminologie, le domaine le plus important est l’analyse comportementale.
Actuellement il n'y a pas en France légalement de métier de "criminologue" ni de "profileur". Certains s'accordent cependant l'un ou/et l'autre titre(s). En revanche des chercheurs, des experts très éminents enseignent la criminologie mais comme toute personne de valeur, ont l'humilité de ne pas se nommer criminologues... d'autres enfin, ont ajouté la formation de criminologie à une connaissance antérieure.
Ainsi sont nées autour de la criminologie,
des spécialisations dans des domaines précis qui tous touchent au phénomène criminel. Les laboratoires de police scientifiques par exemple, emploient autant de professionnels qu'il existe de
pistes de preuve scientifique.
Les fonctions d'expert en psychologie criminelle et de profiler.
Ces fonctions sont souvent confondues par le grand public et surtout les médias qui pensent qu'un expert judiciaire effectue 100 profilages par an. L'expert en psychologie criminelle est d'abord un psychologue clinicien dûment diplômé par une université. Les études de psychologie durent au minimum 5 ans et sont conclues par l'obtention d'un DESS, parfois complétées par un doctorat ou le passage dans un Institut de psychologie pratique dont les stages permettent de se former sur le terrain.
L'habilitation comme "expert près une Cour d'Appel" en France est soumise à l'approbation des magistrats devant lesquels le postulant prêtera ensuite serment. L'expérience du psychologue va bien entendu être l'élément déterminant de son habilitation d'expert. Il est fortement conseillé pour les psychologues qui se destinent à une carrière de psycho-criminologue de suivre un minimum de formation juridique et si possible d'obtenir un diplôme de criminologie. L'institut de Criminologie de Paris permet d'acquérir cette connaissance, complétée quelques années plus tard par l'Institut des Hautes Etudes de la Sécurité Intérieure (IHESI) dont l'enseignement d'une rare richesse aborde toutes les facettes de la sécurité.
Des formations spécifiques notamment en matière de témoignages d'enfants abusés sont souvent
proposées et l'école canadienne. Van Gijseghem fait autorité en la matière.
Le fonctionnement en France:
L'enquête.
Elle appartient aux services de police. Le ou les
enquêteurs la mènent seuls selon les instructions du magistrat. Les experts n'y participent pas sauf parfois dans le cadre d'un "conseil psychologique" qui peut être un simple appel téléphonique
d'un enquêteur à un expert qu'il connaît pour avoir son avis sur un point précis. Les recherches sont fondamentalement axées sur les indices, les preuves, le recueil des données surtout
matérielles, vérifications d'alibis etc.
L'expertise de la psychologie criminelle.
C'est seulement elle et l'expérience qui permettent
d'analyser un acte criminel. C'est l'analyse de la personnalité d'un auteur ou d'une victime connus. Elle consiste à pratiquer l'étude psychologique d'un mis en examen ou d'une victime, avec
l'aide de tests notamment projectifs, et de rédiger les conclusions de l'examen pratiqué. Elle doit être faite par un psychiatre ou par un psychologue en collaboration avec un
médecin.
Le profilage.
Même s'il ne se conçoit qu'en relation étroite avec les acteurs de la procédure il appartient à l'expert désigné sous le regard du juge d'instruction qui l'a nommé. Il entend avec sa compétence de "spécialiste de la psychologie", les parties civiles, victimes ou ayants droit et les témoins. Il peut être autorisé à assister à une garde à vue, à y participer et peut avant qu'elle ait lieu, apporter des indications sur la conduite à tenir, sur les questions à poser, et ce en fonction de l'étude antérieure de la personnalité de la personne gardée à vue.
Le profilage n'a pas pour fonction d'identifier un auteur, mais d'établir le type psychologique probable de l'individu susceptible d'être compatible avec le type de passage à l'acte.
Le profilage est différent selon les dossiers et la qualification pénale :
- Pour un homicide volontaire il sera essentiellement constitué d'une recherche sur la victime et sa biographie, alors que pour une série de viols sur mineurs sans lien victimologique spécifique les reliant, il s'agira surtout d'une étude approfondie du modus operandi et du comportement de l'auteur pendant les actes.
- Pour un tueur multirécidiviste on s'attachera à l'étude des victimes, aux modes opératoires et à l'élaboration d'un profil type en fonction des actes commis, des lieux, des armes, des sévices sexuels etc...
- Un profilage peut aussi être demandé en cas de doute du magistrat instructeur sur
la réalité d'un suicide. Il faut alors déterminer si la personnalité du suicidé est compatible avec le mode opératoire utilisé, des antécédents, des motifs etc, ou si au contraire on peut
soupçonner un homicide ; l'inverse s'est aussi présenté et ce qui pouvait apparaître comme un homicide était en fait le suicide d'un pervers qui avait parfaitement rassemblé autour de sa mort les
faux indices, conduisant sa femme (infidèle) à être mise en examen pour assassinat.
Sources: Psychocrime.com, le site de Michèle AGRAPART-DELMAS: psychocriminologue. Site et propos de Sylvianne Spitzer Divers entretiens.